"Ce coup d’essai n’est sans doute que le premier d’un futur maître"

Rencontres de troisième période

Filippo Gorini, le plein d'énergie pour le dernier Beethoven

Programme colossal pour pianiste ambitieux : le très jeune Filippo Gorini n’a pas peur de réunir deux sonates « dernière période » de Beethoven on ne peut plus périlleuses, celles qui dans ce groupe d’œuvres demandent à la fois de la maturité et de l’énergie pour être réussies. De l’énergie, le pianiste italien en a ici en abondance et comme dans ses Variations Diabelli qui l’avaient révélé comme un beethovénien inspiré (lire ici), il attaque la « Hammerklavier » franchement, armé d’une technique jamais prise en défaut mais jamais démonstrative non plus. Rien ne lui échappe dans le premier mouvement, porté par une fougue intarissable, ni dans le finale, gigantesque construction mise à nu dans chaque détail sans qu’elle ne perde en force. Il ne lui manque qu’un rien d’abandon dans le méditatif mouvement lent, toujours aussi bien pensé mais un rien trop cérébral pour que cette « Hammerklavier » puisse convaincre pleinement. Mêmes qualités dans l’ultime op. 111 de tous les contrastes : un allegro con brio éruptif où il ne lâche prise et une arietta où il ne lâche peut-être pas assez pour trouver ce ton de renoncement, ce sentiment de quitter ce monde que l’on retrouve chez un Serkin ou un Pollini. Mais ce coup d’essai n’est sans doute que le premier d’un futur maître. 

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